Le cancer de la prostate est l’un des cancers les plus fréquents chez l’homme, avec le cancer du poumon et le cancer colorectal (selon l’Institut National du Cancer). Il est aujourd’hui bien soigné, mais les traitements actuels sont source d’effets secondaires et impactent la sexualité des hommes qui en sont atteints. L’étude de Tucker SR et al. établit un modèle, permettant d’expliquer l’évolution de l’intimité sexuelle, suite à un traitement du cancer de la prostate. En parallèle, l’étude de Kelly D et al., souligne l’importance de l’accompagnement des couples, pour le franchissement des étapes menant à un retour ou à un renouveau de leur intimité.
Effets des traitements sur la sexualité
Le cancer de la prostate concerne un homme sur huit. Le dépistage, de plus en plus important, favorise aujourd’hui la détection à un stade précoce.
L’efficacité des traitements est avérée, mais ils entraînent tous des conséquences, notamment une détérioration de la fonction ou des aptitudes sexuelles. Cette détérioration sexuelle impacte fortement l’état psychologique des patients et a des effets sur les relations qu’ils nouent avec leurs partenaires. Les conséquences physiques possibles des traitements du cancer de la prostate sont bien connues : troubles de la libido, de l’érection et de l’éjaculation.
En revanche, les conséquences sur l’intimité sexuelle et sur l’influence qu’elle peut avoir sur la survie et la guérison des patients, sont peu documentées.
Une nouvelle compréhension de la récupération sexuelle
L’étude menée par Tucker SR et al., parue le 4 juillet 2016 dans Social Science & Medicine, est une synthèse de la littérature traitant du sujet, dans le cas d’un cancer de la prostate localisé. Elle vise à établir un modèle explicatif de l’évolution de l’intimité sexuelle, après un cancer localisé de la prostate.
Ce modèle caractérisant la récupération de la fonction sexuelle comprend 4 composantes :
- La perte de l’intimité et le chagrin dû à une intimité détruite
- L’initiation d’une démarche résolutive et l’intimité artificielle (différentes méthodes chirurgicales permettent un retour de cette intimité telles que les pompes et implants péniens, lesquelles sont parfois également utilisées par les hommes âgés)
- La peur de l’échec et l’évitement de l’intimité, par crainte de ne pas être performant
- La construction et l’exploration d’une intimité alternative, avec son/sa partenaire
Ce concept permettrait, selon les chercheurs, de bénéficier d’un modèle de récupération sexuelle après un cancer de la prostate, qui serait utile aux professionnels de santé. Les 4 composantes du modèle pourraient être utilisées afin de soutenir les patients et leurs partenaires.
A savoir ! Après une prostatectomie, l’homme peut avoir un orgasme sec, consistant en un plaisir identique, mais sans éjaculation. La résection transurétrale de la prostate, qui consiste à retirer le tissu prostatique par l’urètre, peut entraîner une éjaculation rétrograde, avec une évacuation du sperme dans la vessie, faisant apparaître l’urine trouble après l’orgasme. De nombreux hommes, souffrant de troubles ou d’absence d’érection après un cancer de la prostate, conservent leur capacité à éprouver du plaisir sans avoir d’érection et de rapport sexuel. Une nouvelle intimité à partager avec leur partenaire serait donc à explorer.
L’accompagnement des couples, une future thérapie?
D’autres études, portant sur l’accompagnement des couples ont déjà été menées et indiquent que le cancer de la prostate, aurait un impact sur les deux partenaires, ainsi que sur leur relation.
Une étude parue dans Translational Andrology and Urology, souligne que l’adaptation à la dysfonction érectile au sein d’un couple prend du temps et que l’importance de l’événement pour le couple ne doit pas être sous-estimée. Les chercheurs suggèrent donc de mettre en place un modèle de soins, consistant à accompagner les partenaires dans leur parcours, afin qu’ils puissent franchir les étapes menant vers le retour ou le renouveau de leur intimité, ensemble.
Yasmine Z., Journaliste Scientifique
Sources :
Tucker SR et al. Development of an explanatory model of sexual intimacy following treatment for localised prostate cancer: A systematic review and meta-synthesis of qualitative evidence. Social Science & Medicine. 4 juillet 2016 / DOI: 10.1016/j.socscimed.2016.07.001
Kelly D et al. Co-constructing sexual recovery after prostate cancer: a qualitative study with couples. Translational Andrology and Urology. Avril 2015 / DOI: 10.3978/j.issn.2223-4683.2015.04.05