Une nouvelle technique de traitement de l’hypertrophie bénigne de la prostate est en train de voir le jour. Plus de 1 000 patients ont déjà été traités dans le monde avec succès. Un grand programme hospitalier de recherche clinique va être lancé en France sur cette alternative à la chirurgie de la prostate : l’embolisation.
Hypertrophie de la prostate : Les traitements classiques
L’hypertrophie bénigne de la prostate (HBP) se caractérise par une augmentation non-cancéreuse de la taille de la prostate. Cette maladie est très fréquente : elle touche 18 % des hommes à 40 ans, et 50 % à 70 ans. Elle entraîne une compression de l’urètre qui est à l’origine de nombreux désagréments (envies pressantes, mictions nocturnes, infections urinaires…).
Devant ces symptômes, les hommes se voient en général proposer un traitement médicamenteux. Lorsque celui-ci n’est pas ou plus efficace, une adénomectomie (ablation de la partie hypertrophiée de la prostate) peut être réalisée.
Cette chirurgie se réalise par incision cutanée au-dessus du pubis ou par voie endoscopique (par le pénis). Les complications usuelles à court terme sont :
- Des saignements, quelques jours à quelques semaines après l’intervention ;
- Un blocage transitoire de la vessie (incapacité temporaire à uriner) nécessitant la pose d’une sonde ;
- Une infection urinaire ;
- Un rétrécissement secondaire des voies urinaires nécessitant une nouvelle opération.
À long terme, la complication la plus fréquente est l’éjaculation rétrograde. Lors de l’orgasme, le sperme est émis dans la vessie (et non vers l’extérieur) du fait de l’élargissement du col de la vessie suite au retrait de la partie hypertrophiée de la prostate. Sans retentissement sur la santé, cela peut cependant gêner la vie sexuelle du patient, ou sa capacité à procréer.
L’embolisation : qu’est-ce que c’est ?
L’embolisation est une technique qui consiste à venir boucher les petites veines à l’intérieur de la prostate hypertrophiée par des microbilles. Moins alimenté par le flux sanguin, le tissu prostatique régresse : une étude a montré que son volume passait en moyenne de 96 à 46 cm3.
Concrètement, un radiologue introduit un cathéter dans l’artère fémorale du patient, puis remonte jusqu’aux artères prostatiques et à la prostate. Là, il injecte les microbilles sous contrôle radiologique. L’intervention se déroule sans anesthésie générale en hospitalisation de jour. On pratique éventuellement une anesthésie locale au point de ponction fémoral. Le radiologue opère des 2 côtés. Il faut compter environ 2 heures d’intervention.
La technique, assez délicate, nécessite un opérateur expérimenté.
L’embolisation : de nombreux atouts
Avec l’embolisation des artères prostatiques, les complications sont réduites. Certains patients peuvent présenter des douleurs et une difficulté temporaire à uriner. Ces désagréments sont soulagés par des antidouleurs et alphabloquants. L’embolisation n’entraîne pas d’éjaculation rétrograde.
Cette technique est intéressante à la fois :
- Pour des patients jeunes qui veulent pouvoir continuer à mener une sexualité normale ;
- Pour des patients très âgés, ou souffrant de pathologies associées, pour lesquels la chirurgie classique est contre-indiquée.
La limitante de l’embolisation est l’état des artères fémorales qui doit être suffisamment bon pour y introduire un cathéter.
Environ 1 000 patients dans le monde ont été traités par cette technique. On ne déplore ni décès, ni complication grave.
A l’hôpital Georges-Pompidou (Paris), le service de radiologie interventionnelle a opéré 150 patients.
- 50 % ont été très améliorés et ont pu arrêter tout médicament;
- 25 % conservent une petite gêne ;
- 25 % doivent continuer le traitement médical.
Ces chiffres montrent que les patients ont eu, globalement, une bonne amélioration, bien que moins qu’avec la chirurgie. Une grande étude vient d’être lancée en France. Elle comparera l’efficacité de l’embolisation à celle d’un traitement médical de référence sur les symptômes urinaires. Dix hôpitaux vont y participer.
Dans l’avenir, l’embolisation pourrait également permettre d’injecter des microparticules contenant des molécules de chimiothérapie au cœur du tissu prostatique : un espoir dans le traitement du cancer de la prostate.
Isabelle V., Journaliste scientifique
Sources :
Hypertrophie de la prostate, l’embolisation se démocratise, Pr Nicolas Thiounn, entretien réalisé par Chantal Guéniot, Egora, le panorama du médecin, n°27, 20-26 Février 2017
Hypertrophie de la prostate : Traitements, Prostate.fr, Consulté 23 février 2017
Adénomectomie prostatique chirurgicale , Urofrance, Association française d’urologie – 31 mai 2012