En France, chaque année, sont recensés plus de 50 000 nouveaux cas de cancer de la prostate. L’hormonothérapie représente l’une des options thérapeutiques possibles pour les patients, mais son efficacité est souvent limitée dans le temps. Récemment, des chercheurs américains ont identifié un ARN thérapeutique, potentiellement suppresseur de tumeur prostatique. Explications.
Hormonothérapie et cancer de la prostate
Parmi les traitements du cancer de la prostate figure l’hormonothérapie, qui consiste à agir sur la composante hormonale de la tumeur. En effet, les hormones sexuelles masculines ont tendance à favoriser le développement de la tumeur prostatique. En bloquant l’action de ces hormones, les médecins peuvent agir sur la tumeur. Mais cette action est souvent limitée dans le temps, car des mécanismes de résistance se mettent en place après une ou deux années.
Pour les patients devenus résistants aux traitements hormonaux, l’arsenal thérapeutique se réduit. Face à ce problème, les chercheurs se mobilisent pour trouver des alternatives thérapeutiques efficaces, parmi lesquelles l’ARN thérapeutique. Des chercheurs américains se sont penchés sur le gène codant pour le récepteur aux androgènes exprimé par les cellules cancéreuses prostatiques. Ce récepteur se lie aux hormones sexuelles masculines, en particulier la testostérone, et cette liaison provoque une stimulation du développement de la tumeur.
Un suppresseur de tumeur révélé par un ARN thérapeutique
En étudiant l’ADN de ce gène, les chercheurs ont identifié à côté du gène, une longue zone de régulation de l’expression de ce gène. Dans l’organisme, cette zone de régulation est masquée par le récepteur aux androgènes lui-même. Ce n’est qu’en supprimant le récepteur aux androgènes par un ARN spécifique que les chercheurs ont pu découvrir cette zone de régulation, qui pourrait selon eux être un suppresseur de tumeur prostatique.
Cet ARN, développé initialement pour réduire la liaison entre la testostérone et le récepteur aux androgènes, s’est révélé particulièrement efficace pour réduire l’expression du récepteur aux androgènes, grâce à la mise en évidence du suppresseur de tumeur. En transplantant des fragments de tumeur prostatique humaine chez la souris, les chercheurs ont observé que l’expression du suppresseur de tumeur, rendue possible grâce à l’ARN thérapeutique, entraînait la réduction des tumeurs.
Une perspective pour les cancers prostatiques résistants ?!
De tels résultats semblent prometteurs, car ils offrent aux médecins pour l’avenir deux perspectives thérapeutiques :
- L’ARN thérapeutique ciblant la résistance à l’hormonothérapie ;
- Le suppresseur de tumeur, dont seule une petite fraction suffit à produire l’effet souhaité, et qui agit directement sur la croissance tumorale.
En associant ces deux éléments dans une nanoparticule, les chercheurs pourraient développer une thérapie efficace contre les formes résistantes de cancer prostatique. Les chercheurs souhaitent déposer deux brevets sur ces substances et sur leur intérêt thérapeutique dans le cancer prostatique. Des essais précliniques et cliniques pourraient ensuite être lancés pour confirmer les résultats obtenus et envisager si possible une utilisation thérapeutique chez l’homme.
Estelle B., Docteur en Pharmacie
– Loss of long noncoding RNA NXTAR in prostate cancer augments androgen receptor expression and enzalutamide resistance. Ruchi Ghildiyal and al. 2021. Cancer Research. 3845:2020. pubmed.ncbi.nlm.nih.gov